AU PALAIS Agression filmée d’un élève de 11 ans au dortoir du collège : la directrice relaxée
La cour d'appel de Nîmes a relaxé la directrice d'un collège prévenue de "non-dénonciation de mauvais traitement, privations, agressions ou atteintes sexuelles infligées à un mineur". Le directeur-adjoint n'avait pas fait appel de sa condamnation en première instance.
C’est une affaire humainement difficile qui est arrivée à la barre de la cour d’appel de Nîmes il y a quelques jours. La directrice d’un collège de Lozère a fait appel de sa condamnation par le tribunal correctionnel de Mende pour des faits "non-dénonciation de mauvais traitement, privations, agressions ou atteintes sexuelles infligées à un mineur". Le directeur-adjoint de cet établissement a également été sanctionné en Lozère, mais lui n’a pas fait appel de la décision, il n’était donc pas rejugé à Nîmes et sa sanction est définitive.
Agression filmée d’un élève de 6e dans le dortoir
Le contexte se situe dans le dortoir d’un collège lozérien (*) dans la nuit du 24 au 25 avril 2019. Des élèves de troisième partagent le dortoir avec des "petits de 6e". Des jeunes regroupés pour des raisons de surveillance car la plupart des autres collégiens sont en voyage scolaire… avec la directrice.
Cette nuit-là un élève pensionnaire de 11 ans va être réveillé et agressé par d’autres élèves, plus grands. « Ils vont faire ce qu’ils appellent une série avec une victime. Ils réveillent ce garçon. Ils mettent le lit en cathédrale, puis cet enfant va recevoir des coups. Il est frappé à coups de pieds et poing avant de tomber », résume la juge nîmoise avant de poursuivre : « Ils vont faire des simulations à caractère sexuel avec un bâton et on voit les souffrances car le tout est filmé et on entend cette petite victime gémir. »
Dès le lendemain des rumeurs de cette agression tournent dans le collège et un professeur mis au courant. Ce dernier va voir le directeur-adjoint. C’est là que l’affaire va prendre un tour administratif et judiciaire à la fois avec la mise en cause de la direction du collège. Car ont-ils alerté rapidement l'autorité judiciaire ? Les collégiens auteurs de l’agression eux ont depuis été sanctionnés par le tribunal pour enfants.
La direction ne signale pas l’agression
« La direction est obligée immédiatement d’alerter l’autorité judiciaire, les gendarmes, c’est une obligation légale, mais aussi une nécessité humaine. Comment peut-on être insensible à la souffrance visible sur les images vidéos de cet enfant car c’est un enfant qui est abaissé, humilié, détruit dans un dortoir du collège sans qu'aucun adulte n'intervienne », dénonce maître Mathieu Montfort pour la victime et ses parents.
« Il est impensable qu’ayant la vidéo en main le lendemain la direction ne fasse pas ce signalement. On voit sur les images au moins sept actes de violences sur un enfant qui crie de douleur. Lorsque vous confiez vos enfants, vous attendez un minimum de protection », accable le pénaliste de Montpellier. Là, au contraire, la direction, qui a appelé les parents, a totalement minimisé les violences et n'a pas signalé les souffrances. »
Car si les faits se déroulent dans la nuit du 24 au 25 avril 2019, ils ne seront signalés officiellement par la direction que plusieurs jours plus tard, au mois de mai. La gendarmerie est entre-temps dans les murs de l’établissement scolaire après avoir été alertée par d’autres voies.
« Je n’ai pris connaissance des violences que le samedi à mon retour de voyage scolaire avec d’autres élèves », affirme depuis le début la directrice du collège en contradiction avec les propos de son adjoint qui déclare avoir alerté la directrice beaucoup plus rapidement. Cette dernière serait arrivée le vendredi soir et son adjoint lui aurait dit : « Je dois te parler demain », raconte la directrice à la barre de la cour d'appel correctionnelle, alors que l'agression datait de plusieurs jours.
« Mais pourquoi lorsque vous revenez et que vous avez les infos, vous ne faites pas ce signalement ? », insiste la juge de la cour d’appel. « Je savais que les gendarmes étaient au courant puisqu’ils étaient dans l’établissement, donc je pensais que je n’étais pas dans cette obligation », poursuit la responsable suspendue depuis ces événements d’avril 2019. « Votre obligation de dénonciation des faits, des sévices, est absolue madame », estime pour sa part l’avocat général, Dominique Sié, qui réclame condamnation.
La cour d’appel de Nîmes, elle, a estimé au contraire qu’elle avait « une obligation relative » pour ce signalement car les gendarmes étaient déjà au courant des faits et l’enquête avait été initiée par d'autres biais. La directrice défendue par Maître Véronique Barnier a demandé et obtenue la relaxe.
Boris De la Cruz
* Le nom du collège n’est pas indiqué afin de protéger l'anonymat de la victime mineure.
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