FAIT DU JOUR À Valleraugue, Dylan Whalen veut régénérer les sols grâce au mycélium
Lauréat, pour le Parc national des Cévennes, du trophée Réserve de Biosphère avec son projet MamyCélium, Dylan Whalen souhaite développer la mycorestauration des sols, en prenant le pourtour de l'Aigoual comme zone d'application. Une collaboration est envisagée avec des étudiants de l'IMT Mines Alès.
La nature n'a définitivement pas livré tous ses secrets. Et son sous-sol encore moins. Alors que des ouvrages ont récemment impressionné en détaillant le lien que les arbres entretiennent entre eux, via le mycélium dont tout sous-sol est pourvu, celui-ci semble receler des potentialités encore mal connues. C'est sur ces potentialités que Dylan Whalen, accompagné de son épouse Marwa El Chab Whalen (elle-même anthropologue), compte appuyer son association, MamyCélium, encore à l'état d'embryon.
Franco-américain, Dylan a rejoint sa mère (française) à Valleraugue, en 2016. Il a, depuis, eu le temps de faire mâturer son projet dans une phase plus introspective de sa vie, au pied de l'Aigoual. Après des études en physique et botanique, et avoir travaillé comme paysagiste en auto-entreprise, il se penche plus sérieusement sur le mycélium, organisme dont l'étude, aux États-Unis, est bien plus avancée qu'en France. Avec un guide spirituel, "comme un hommage et une continuité", Paul Stamets, amateur devenu spécialiste du mycélium et promoteur de ses multiples avantages scientifiques (1).
Dylan Whalen s'inscrit donc dans une continuité... qui apparaît très neuve en France. "Dans le milieu scientifique, explique Marwa El Chab Whalen, la recherche sur le mycélium a plutôt été faite par des amateurs. Lui aussi était un amateur." Mais depuis, il a déposé une série de brevets qui font de lui une autorité en la matière : sur des pesticides à base de mycélium, les propriétés médicinales de certains d'entre eux - dont certains réduisent les effets secondaires des chimiothérapies et accentuent les effets réparateurs. "Le gros de son travail repose sur la question de la regénération des éco-systèmes", poursuit Dylan Whalen, sujet pour lequel il est devenu prestataire de l'armée américaine.
"Dans tout domaine de recherche, il faut comprendre le fonds. Puis, quand on avance, il faut cibler." Pour Dylan, la cible sera donc la mycorestauration, soit l'utilisation de certains mycéliums pour nettoyer leurs sols des pathogènes, comme les pesticides. Dans les Cévennes, la monoculture du châtaignier d'autrefois reste, par exemple, un vecteur de déséquilibre des écosystèmes. Il y a aussi les métaux lourds. "Certains mycéliums vont les rendre inoffensifs quand d'autres vont les transformer, poursuit Dylan Whalen. Et si ce n'est pas possible, l'idée est de proposer une technique à partir d'éléments fongiques."
Que les cueilleurs de champignons du dimanche se rassurent : cela ne signifie pas que les cèpes cévenols seront désormais chargés en métaux lourds. Car on parle bien, ici, de mycélium dont le champigon est parfois le fruit. Mais seuls 10% des mycéliums donnent des champignons, sachant qu'il y a six fois plus de mycéliums que d'espèces végétales. Des chiffres qui laissent entrevoir des perspectives à donner le tournis sur les potentialités susceptibles d'être découvertes dans ces millions d'organismes.
"Utiliser le jardin de la maison comme vitrine expérimentale"
"On va utiliser le jardin de la maison comme vitrine expérimentale, sourit Marwa El Chab Whalen. Notre objectif de collaboration avec l'IMT Mines Alès est de nourrir leur programme de recherche en leur proposant de travailler avec le sol d'ici." Un travail qui passe, au préalable, par une analyse du sol. "Si on trouve un métal lourd, on regarde d'abord ce qu'il y a comme espèce indigène de mycélium, détaille Dylan Whalen. Parce que, a priori, il est déjà venu en réponse à ce problème." Le but est, ensuite, de le développer, de le cultiver, pour le réimplanter au niveau du sol en ayant optimisé ses performances.
"Plus on aura de méthodologie, plus on pourra adapter nos techniques de mycorestauration", anticipe Marwa El Chab Whalen. Car le couple, associé au sein de MamyCélium, trouve intéressant "d'envisager tous les cas d'études", alors que le projet devait préalablement porter sur les éventuelles pollutions du fleuve Hérault, qui passe sous leurs fenêtres. Viendra, ensuite, le temps d'une forme de commercialisation, "ne serait-ce qu'au niveau du conseil à apporter". Le couple ne cache pas sa volonté entrepreneuriale. Mais la phase associative offre un statut d'une grande liberté pour la recherche.
Car au-delà des sites à dépolluer, Dylan Whalen pense aussi aux espèces. "Pour les abeilles, le mycélium peut être la solution. Quand une espèce est attaquée, il y a deux approches : soit vous attaquez directement ce qui vous attaque, soit vous renforcez le système immunitaire. Avec le mycélium, on a les deux actions." Et la richesse organique du sol en prime.
(1) Paul Stamets a écrit deux ouvrages traduits en français, Le mycélium à la conquête du monde et Hallucinants champignons. Sa conférence TED, de 2008, traduite et sous-titrée, est à retrouver ici.
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