FAIT DU SOIR Un projet de « fournil vagabond » pour « proposer du bon pain un peu partout »
« Faire du vrai pain, c’est presque un projet militant, engagé », assure Juan Manuel Gamarra, installé avec sa famille à Pujaut depuis plusieurs années. Après un parcours qui l’a vu passer par l’enseignement, les relations internationales et le maraîchage, il se lance dans un nouveau projet de « fournil vagabond ».
L’idée de Juan Manuel Gamarra, 46 ans, originaire d’Argentine, est de se fabriquer un fournil mobile, sur remorque, fonctionnant au bois. « Un four peut cuire 25 kilos de pain, c’est très économique, explique-t-il. L’idée est d’avoir le mien, pour proposer du bon pain un peu partout. » Le Pujaulain s’est construit un atelier chez lui pour confectionner la pâte, et compte avec son fournil mobile « me déplacer sur les marchés, en festival, partout, pour cuire sur place, diffuser les arômes du pain. » Et ce alors que nombre de petites communes n’ont plus de boulangerie, et doivent se contenter d’un simple dépôt de pain.
Son pain, Juan Manuel Gamarra le veut bio et local, en utilisant des farines de moulins certifiés des départements limitrophes du Gard, et en n’utilisant que « quatre ingrédients : de la farine, de l’eau, du sel et du levain. » Car ce projet intervient dans « une quête de sens, de valeurs », pose-t-il. Une quête entamée il y a dix ans, lorsqu’il démissionne de l’Éducation nationale et de son poste de professeur d’Espagnol.
« Un coup de foudre pour le pain au levain »
« J’ai commencé à me chercher en 2012 lorsque mon fils est né », rembobine-t-il. Il quitte alors Avignon et s’installe en famille à Pujaut, dans une bâtisse au coeur des champs, à l’écart du village. Il réussit le concours de Sciences Po Lyon en Relations internationales, et passe six mois en stage à la FAO, l’organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, à Cuba. Il y découvre ce que les cubains, contraints par des sanctions internationales, sont capables de faire en termes d’agriculture urbaine.
« J’ai toujours été intéressé par ces questions », reprend-t-il. Juan Manuel cherche à poursuivre dans cette branche en Amérique du Sud, mais finit par rentrer en France sans avoir trouvé chaussure à son pied. Il passe alors par le chantier d’insertion avignonnais Semailles, où en tant qu’encadrant technique il met la main à la pâte de leur maraîchage bio. Pour la première fois, il a « les mains dans la terre » et passe de la théorie à la pratique, puis part à la fin de son contrat aidé après avoir « appris mille choses ».
Après un nouveau détour par l’enseignement et des projets autour de la terre au sein de l’école Montessori d’Avignon, il choisit de découvrir les vendanges à Châteauneuf-du-Pape, puis la confection du fromage en Suisse, où il sera vacher dans une exploitation de fromage à raclette. Puis vient « le coup de foudre pour le pain au levain », comme ce touche-à-tout le raconte. Le confinement arrive, et avec son fils, Juan Manuel fabrique un four à pain dans son jardin et s’exerce. Suivent deux formations et des stages dans des boulangeries traditionnelles où il pratique ce qu’il ne veut plus faire désormais : la fabrication de pains et de viennoiseries avec des ingrédients issus de l’industrie, aux multiples ingrédients chimiques.
Un financement participatif bien parti
De quoi conforter son projet de faire « du vrai pain », dans un secteur de plus en plus dominé par les boulangeries industrielles. Dans ce contexte, Juan Manuel trouve « presque subversif » de faire du pain réellement traditionnel et de ne pas chercher à produire pour produire — et gaspiller. « Même si je pourrai enchaîner les fournées, l’idée sera d’en faire deux ou trois, et de proposer des miches et quelques plaques de pizza », précise-t-il.
Avant d’en arriver là, Juan Manuel passera son CAP le 8 juin, et ira fabriquer son propre fournil mobile à la mi-juin avec l’association de l’Atelier paysan, grâce au succès de la campagne de financement participatif qu'il a lancé sur la plateforme Ulule. Le premier palier de 6 000 euros, lui permettant de financer le kit de fabrication du fournil, est atteint depuis peu, et désormais notre porteur de projet vise plus haut, pour se procurer un équipement plus perfectionné. Si tout va bien, Juan Manuel a prévu de démarrer l’activité du « fournil vagabond » dès le mois de juillet.
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