FAIT DU SOIR Tailler la vigne aidé d’un exosquelette : une expérimentation menée au Château d’Aiguilhon
Dans les terres, les salariés sont à pied d’oeuvre pour tailler la vigne en ce début d’année. L’opération est très importante pour le bon développement des raisins, mais elle peut être harassante pour les corps. Au Château d’Aiguilhon, à Sauveterre, une expérimentation avec des exosquelettes est menée pour soulager les salariés.
Il est 11h ce mercredi matin, le mistral souffle fort sur les 47 hectares en Côtes du Rhône du Château d'Aiguilhon, entre Sauveterre et Pujaut. Au milieu des enfilades de pieds noueux, se trouvent Jean-Noël, Julien et Amar. En ce moment et jusqu’au 15 mars, ils braveront le froid et passeront huit heures par jour dans les vignobles avec leur sécateur. Cachés sous leurs épais vêtements, on distingue une drôle d’armature. Il s’agit d’exosquelettes.
Depuis quinze jours, les trois employés les portent et taillent les vignes avec. Le but est de les soulager dans cette tâche qui amène des postures peu confortables et des gestes répétitifs. « On a trois types d’exosquelettes, plus ou moins importants. Ils les essaient pendant quinze jours à chaque fois pour trouver le modèle qui leur convient le mieux », explique Anaïs Comerly, responsable commerciale et évènementiel au domaine.
"Le soir, on a moins mal au dos"
L’expérimentation débute seulement, mais les premiers effets sont déjà notables. Notamment pour Julien, la trentaine, qui travaille depuis sept ans sur l’exploitation. « On le sent, le soir, on a moins mal au dos. Car on est penché toute la journée », indique-t-il. La douleur se fait encore plus ressentir après la taille de jeunes vignes, qui sont moins hautes et qui obligent à se baisser davantage. Jean-Noël aussi est très satisfait. Après 17 ans passés dans les cuisines, il a choisi le grand air. Mais le métier n’en est pas moins physique : « L’exosquelette aide vraiment quand on se relève. Je ne le quitte même pas pour manger à midi.»
Lui et ses collègues changeront de modèles ce vendredi. Peut-être que le prochain sera encore plus ergonomique. Mais déjà ce nouvel équipement semble faire corps avec ses porteurs. Il se compose d’un baudrier relié à la taille par des canules souples en fibre de verre. Il s’agit d’une assistance passive qui prend appui sur les genoux. « Ils sont vraiment soutenus, le but, c’est de rendre le mouvement plus doux », résume Anaïs Comerly.
Avec une moyenne de 3 500 pieds à l’hectare, les maux dus à la répétition du mouvement peuvent vite se faire sentir. Depuis quelques années, on voit se développer les exosquelettes dans les domaines de la manutention, dans l’industrie mais aussi pour soulager les personnes à mobilité réduite. Ces structures mécaniques qui doublent le squelette humain commencent à arriver dans d’autres secteurs, comme l’agriculture. C’est particulièrement judicieux pour la taille de la vigne car c’est une action où la main de l’homme reste indispensable et ne peut pas être remplacée par la machine. « On a des outils précis capables de faire des pré-tailles mais sur les vieilles vignes, c’est trop dangereux. Il y a un espace à respecter, des endroits où il ne faut pas couper », atteste la responsable commerciale.
Une expérimentation menée avec la MSA Languedoc
Le Château d’Aiguilhon peut bénéficier de cette expérimentation, grâce à un partenariat entre la MSA Languedoc (Mutualité sociale agricole) et Charrière Distribution, spécialisée dans le conseil aux agriculteurs pour une pratique plus raisonnée. Il faut dire que Stéphan Charrière, son dirigeant, est aussi le propriétaire du domaine sauveterrois depuis les années 80. Toujours à la pointe de la technologie, c’est tout naturellement que le Château d’Aiguilhon a été choisi pour ce programme expérimental. À la fin des semaines de test, la MSA pourra évaluer si les employés sont soulagés sur le long terme et si la douleur ne se reporte pas à une autre partie du corps.
Stéphan Charrière a toujours placé le bien-être de ses collaborateurs comme fil rouge. Il a déjà mis en place un système pour faciliter la préparation de traitements et pour réduire la pénibilité du travail : les salariés font les mélanges au sol et ce sont des robots automatisés qui se chargent de remonter les contenants sur la machine. « Je pense que si je prends soin de mes salariés, ils me le rendront. S’il y en a un qui est absent parce qu’il a un accident de travail, on ne peut plus travailler. Sans eux, je ne peux pas exister. Tout ce que je crée est tourné autour du respect de mes collaborateurs. On est une équipe », témoigne le propriétaire.
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